Doubs (la commune, pas le dĂ©partement) – Chaque matin, Jojo, frontalier canal historique, quitte son pavillon de Doubs (la commune, pas le dĂ©partement) au volant de son Audi RS6 pour pointer Ă lâheure chez Rolex Ă Bienne. En se plaignant de l’absence de tirette.
Sur le papier, une belle vie. Dans les faits : lâenfer.
Non pas Ă cause de la neige, des contrĂŽles douaniers ou de la buĂ©e sur les lunettes de soleil Ă 6h15, non. Ă cause dâun vide juridique sournois, cruel, absurde, et qui transforme le quotidien des frontaliers en rodĂ©o urbain : lâabsence de la rĂšgle de la tirette dans le Code de la route français.
Jojo le dit sans détour :
« On nâen peut plus. Tu arrives Ă un rĂ©trĂ©cissement, tu veux faire la tirette comme en Suisse, tu te fais klaxonner, insulter, bloquer. Et derriĂšre ça bouchonne sur 6 km. Câest tous les jours pareil. Et pas Ă cause d’un hĂ©risson qui traverse imprudemment la chaussĂ©e. »
Jojo, que l’on cherche toujours Ă l’heure d’Ă©crire ses lignes, pour obtenir un tĂ©moignage plus prĂ©cis.
 Dans cet article
đ”ïž En Suisse, câest la loi. En Belgique aussi. En France ? NĂ©ant.
La rĂšgle de la tirette â ou fermeture Ă©clair pour les plus coquets ; ou zip pour les posts sur LinkedIn â consiste Ă sâinsĂ©rer alternativement dans une seule file lorsquâune voie est supprimĂ©e. Câest simple, efficace, presque Ă©lĂ©gant.
En Suisse, câest obligatoire : un conducteur qui ne laisse pas passer son alter ego peut Ă©coper de CHF 100 dâamende. En Belgique, depuis 2014, câest pareil, version 58âŻâŹ cash. Les gendarmes sont formĂ©s, les panneaux sont explicites, les conducteurs respectent.
Et en France ? On vous laisse deviner. Pas de loi. Pas de panneau. Pas de pĂ©dagogie. Une tolĂ©rance variable selon les CRS, et surtout un folklore autoroutier digne des grandes migrations de sangliers : celui qui sâinsĂšre est un sauvage, celui qui laisse passer est un traĂźtre, et celui qui bloque tout est persuadĂ© de dĂ©fendre la patrie.
đŠșQuand deux conceptions du monde se tĂ©lescopent Ă Jougne
Câest bien lĂ tout le problĂšme : les frontaliers qui roulent tous les jours cĂŽtĂ© suisse ont intĂ©grĂ© cette rĂšgle comme un geste civilisĂ©. Ceux qui restent cĂŽtĂ© français nâont jamais entendu parler de ça, ou alors vaguement, entre deux Ă©pisodes de Turbo.
DâoĂč des scĂšnes de western Ă chaque rĂ©trĂ©cissement sur les routes du Haut-Doubs :
â AccĂ©lĂ©rations violentes pour âpasser avant lâautreâ
â Clignotants ignorĂ©s
â Klaxons, noms dâoiseaux, et parfois sortie de vĂ©hicule façon gilet jaune vĂ©nĂšre.
Et tout cela, chaque matin et chaque soir, sur les axes JougneâVallorbe, PontarlierâLausanne, MorteauâLe Locle⊠Bref : partout oĂč les voies se croisent, le bon sens, lui, sâĂ©vapore.
đ§ąGĂ©rard Poncet (MHDGA) monte au crĂ©neau
InterrogĂ© sur ce drame routier qui gangrĂšne les Doubiens de lâEst, GĂ©rard Poncet, candidat dĂ©clarĂ© du Mouvement du Haut-Doubs â Gens Authentiques, ne mĂąche pas ses mots :
« La tirette, câest pas de la politique, câest de la logique. Quand tu coupes une saucisse en deux, tu fais gauche-droite-gauche-droite. Pas gauche-gauche-gauche et tu pleures parce que tâas pas de moutarde. »
ConcrĂštement, le MHDGA sâengage Ă :
- RĂ©activer la ligne ferroviaire PontarlierâLausanne, « histoire que ceux qui veulent pas faire la tirette puissent au moins faire le rail ».
- Faire du lobbying de chaque instant auprĂšs des dĂ©putĂ©s et sĂ©nateurs pour lâintĂ©gration de la rĂšgle de la tirette dans le droit français ;
- Faire construire une douane Ă 2Ă5 voies Ă Jougne, « pour arrĂȘter de faire du slalom entre deux potelets en plastique » ;
Jojo, lui, devrait sortir sa plus belle plume pour Ă©crire Ă son dĂ©putĂ©. LâOuest RĂ©publicain vous propose de faire de mĂȘme. Voici le modĂšle Ă recopier, imprimer et envoyer entre deux dos-dâĂąne :
đïžModĂšle de courrier Ă adresser Ă votre dĂ©putĂ© ou sĂ©nateur
Objet : Demande dâintĂ©gration officielle de la rĂšgle de la tirette dans le Code de la route
[Monsieur le Député / Madame la Sénatrice],
Je vous Ă©cris en tant quâusager quotidien de la route sur un axe transfrontalier franco-suisse [nommer l’axe, la localitĂ© de dĂ©part et celle d’arrivĂ©e]. Depuis plusieurs annĂ©es, je constate â comme des milliers dâautres automobilistes frontaliers â les tensions croissantes et les comportements dangereux causĂ©s par lâabsence de reconnaissance officielle de la rĂšgle dite de la âtiretteâ dans notre droit national.
Alors que cette rĂšgle est parfaitement intĂ©grĂ©e et obligatoire en Suisse (sanction de CHF 100) et en Belgique (amende de 58âŻâŹ), elle demeure en France dans un vide juridique total. Ce flou provoque, chaque jour, des incomprĂ©hensions entre conducteurs, des altercations verbales, des situations Ă risque, et des bouchons qui pourraient ĂȘtre Ă©vitĂ©s.
Je vous demande donc de porter au Parlement une proposition de loi simple et pragmatique pour :
- Intégrer la rÚgle de la tirette au Code de la route français ;
- Lâaccompagner dâune campagne de sensibilisation nationale ;
- Prévoir une sanction adaptée en cas de non-respect.
Il ne sâagit pas dâune coquetterie de frontalier, mais dâune mesure de sĂ©curitĂ©, de fluiditĂ© et de bon sens.
Nous sommes nombreux à attendre enfin une avancée concrÚte de la part de nos représentants.
Je vous remercie de lâattention que vous porterez Ă cette requĂȘte, et vous prie dâagrĂ©er, Madame / Monsieur, lâexpression de mes salutations distinguĂ©es.
[Nom, prénom]
[Adresse complĂšte]
[Commune]
[Courriel â facultatif]
Jojo, Gérard Poncet et toute la rédaction attendent vos retours. Si vous aussi, vous avez failli vous battre avec un conducteur de 3008 qui refuse de zipper, écrivez-nous via le formulaire. On relaiera.
đŹEt si vous ĂȘtes dĂ©putĂ© ou sĂ©nateur, rĂ©pondez au courrier : y’a du monde en gilet sans manches qui vous regarde.
Vous ĂȘtes parlementaire, vous souhaitez vous emparer du sujet pour insĂ©rer furtivement un “amendement tirette” dans une loi agricole, militaire, Ă©ducative (n’importe quel thĂšme, exceptĂ© la sĂ©curitĂ© routiĂšre) ? Faites le nous savoir.
Un avis sur “đEncore un coup de la tirette : les frontaliers craquent, lâĂtat tergiverse”