Dans le Haut-Doubs, on ne regarde pas le journal : on l’incarne.
C’est une annonce qui a fait tousser dans les chaumières comtoises : jusqu’ici connue pour sa carrière dans le sport, Isabelle Ithurburu devient la remplaçante officielle de Jacques Legros au journal de 13h de TF1.
Une nomination applaudie à Paris et dans les bureaux feutrés de Boulogne-Billancourt. Mais dans le Haut-Doubs, on a l’impression d’avoir raté une marche — ou plutôt, qu’on nous a poussés dans l’escalier.
La Paloise confie à nos confrères du Figaro avoir regardé, « petite » le 13h en compagnie de ses parents « épiciers en Province ».
« On avait Gisèle ! »
Car ici, tout le monde le sait : la vraie prêtresse du 13h, c’est Gisèle. Celle du tabac-presse de Morteau, l’institution. Celle qui commente les reportages avant même qu’ils commencent. Celle qui connaît la météo de Frasne trois jours à l’avance « à l’odeur de l’air ».
Et Gisèle, ce n’est pas qu’avec ses parents qu’elle regardait le 13h : depuis la première du 16 février 1981, elle ne rate jamais un journal.
« Elle avait tout ! La gouaille, les fiches recettes, la météo locale en direct du trottoir ! », s’emporte Roger, 71 ans, en enfilant sa soupe aux vermicelles.
« Isabelle Ithurburu, c’est sûrement une chic fille, mais elle n’a jamais alerté sur une foire aux escargots annulée pour cause de pluie horizontale. »
![Isabelle Ithurburu petite "regardait le 13h de TF1 avec [ses] parents", confie-t-elle au Figaro](https://ouestrepublicain.fr/wp-content/uploads/2025/07/514800410_1187825896717881_7026341240219995576_n-819x1024.jpg)
Le JT, c’est pas un journal. C’est un patrimoine.
À Pontarlier, Jougne, Gilley et jusqu’à Arçon, c’est la stupeur. « TF1, ils veulent reconnecter avec la France des villages, qu’ils disent », souffle Jocelyne, ancienne présidente du comité des fêtes de Goux-les-Usiers.
« Et ils passent à côté de Gisèle, qui incarne tout ce qu’ils cherchent, en mieux. Elle avait même prévu le redoux de janvier 1998. À l’époque, Lacarrau était encore au lycée. »
Car le 13h, ici, c’est sacré. Une sorte de messe laïque, où l’on apprend la fermeture d’une épicerie de Corrèze, le lancement d’une fête du potiron, ou les déboires d’un menuisier reconverti dans la sculpture à la tronçonneuse dans la baie de Somme.
Et ça, Gisèle le vivait. Elle vibrait avec les sujets.
« Même à la retraite, elle corrigeait les infographies »
Aujourd’hui à la retraite, Gisèle continue de commenter le JT depuis son fauteuil en rotin, une main sur sa télécommande, l’autre sur son ticket de loto. Mais la blessure est là.
« On m’a même pas contactée ! J’ai couvert 27 hivers, la crise du lait, l’ouverture du McDo de Pontarlier, et pas un mot. »
Gisèle, du tabac-presse de Morteau
Elle lève les yeux au ciel. « Qu’ils viennent faire un duplex sans réseau entre Chapelle-d’Huin et Le Souillot, on verra comment ils sourient. »
TF1 reste muette, le Haut-Doubs bougonne
Du côté de TF1, silence radio. Une source officieuse évoque un « léger décalage de ton » entre Gisèle et la ligne éditoriale. Comprenez : trop de charentaises, pas assez de brushing. « Elle voulait imposer un générique à l’accordéon et une rubrique sur les recettes au comté », glisse-t-on. « La direction a trouvé ça trop segmentant. »
Dans le Haut-Doubs, on appelle ça être cohérent.
Et maintenant ? Le 13h sous surveillance populaire
Les télés restent allumées, mais l’enthousiasme est refroidi.
« Isabelle, elle est souriante, rien à dire », admet Ginette, 83 ans. « Mais elle prononce “Levier” comme “le vieil homme”. Et elle a confondu “Montlebon” avec “Montauban”. Gisèle, elle, elle aurait fait une grimace rien qu’en entendant ça. »
Les anciens espèrent encore. Un petit rôle pour Gisèle ? Une chronique des cantons oubliés ? Une rubrique « nouvelles du Haut-Doubs » ? Mais pour l’instant, rien.
Et Gisèle de conclure, depuis sa cuisine :
« De toute façon, moi je suis prête. S’ils m’appellent demain, je leur balance direct un sujet sur les mésaventures d’un renard coincé dans un tracteur à Vercel. Avec témoignage et transition douce vers la météo. »

Peut-être que notre Rédaction pourrait envisager sereinement de recruter Gisèle ?