âšMise au point de Carine Terre-Vioux
« Cet article aurait du paraßtre le 3 novembre, mais je me suis mise en grÚve pour protester contre les inégalités femmes hommes, notamment en matiÚre de pratique salariale. »

On connaissait le changement dâheure, voilĂ le changement de salaire.
Depuis ce matin 11 h 30, selon les calculs de lâassociation Les Glorieuses, les femmes françaises travaillent gratuitement jusquâĂ la fin de lâannĂ©e.
Symboliquement, bien sĂ»r. Mais dans le Haut-Doubs, oĂč lâon ne badine pas avec la ponctualitĂ© de lâhorloge comtoise, la pilule a du mal Ă passer.
« Moi, jâai vu lâinfo Ă la radio, jâai lĂąchĂ© la vaisselle Ă 11 h 29 », raconte Nadine, employĂ©e dâĂ©cole Ă Morteau, qui a dĂ©cidĂ© de manifester en silence en laissant son torchon en berne sur lâĂ©vier. « Depuis, jâattends quâon me rappelle pour me dire Ă quelle heure je recommence Ă ĂȘtre payĂ©e. »
 Dans cet article
đ§ź Le compte nâest pas bon
Les chiffres viennent dâun calcul simple : les femmes gagnent en moyenne 15 % de moins que les hommes.
Si lâannĂ©e de travail Ă©tait une journĂ©e de huit heures, elles arrĂȘteraient dâĂȘtre payĂ©es un peu avant midi.
Dans les usines du coin, certains ouvriers ont proposĂ© dâinstaurer une « pause Ă©galitĂ© » Ă 11 h 30 : cafĂ© offert, mais seulement aux collĂšgues fĂ©minines.
Ă Pontarlier, un patron dâatelier avoue ne pas comprendre :
« Moi je paie tout le monde pareil. AprĂšs, si elles partent plus tĂŽt pour aller chercher les gosses, câest pas moi qui fais les lois ! »
Oui, mais justement : ce sont souvent les mĂȘmes qui adaptent leur emploi du temps pour faire tourner la baraque. RĂ©sultat : moins dâheures, moins de primes, moins de tout.
đȘ Travail gratuit, mais facture pleine
LâĂ©cart salarial, câest un peu comme la neige de novembre : tout le monde sait quâelle revient, mais personne nâest prĂȘt.
Et pourtant, les chiffres tombent chaque annĂ©e avec la rĂ©gularitĂ© dâun bulletin mĂ©tĂ©o : dans le Haut-Doubs comme ailleurs, les femmes gagnent en moyenne 10 Ă 20 % de moins selon les secteurs.
Dans les supermarchés de Doubs ou de Gilley, les caissiÚres rient jaune :
« On devrait fermer les caisses Ă 11 h 30 et laisser les messieurs scanner jusquâau soir, histoire dâĂȘtre raccord avec les chiffres ! »
Pendant ce temps, au café du centre, les gars font semblant de ne pas suivre le débat.
« Elles ont raison, mais faut pas quâelles arrĂȘtent toutes Ă 11 h 30, sinon on nâaura plus personne pour nous encaisser Ă midi, » plaisante un habituĂ© du Pontarlier-Presse.
đ§ Et GĂ©gĂ© dans tout ça ?
Gérard Poncet, du MHDGA, y voit une preuve supplémentaire que « Paris a perdu le nord ».
« Chez nous, quand quelquâun bosse, on paie. Point. »
Avant dâajouter, moustache au vent :
« Mais si on devait aligner les salaires des femmes sur ceux des hommes, on serait peut-ĂȘtre obligĂ©s dâaugmenter les hommes pour pas faire de jaloux. »
Une phrase qui a fait bondir GisĂšle, fidĂšle lectrice et ex-tenanciĂšre du tabac-presse de Morteau :
« Non mais lĂ , faut quâil arrĂȘte le Pont ! Quâil vienne voir les fiches de paie des AESH et des femmes de mĂ©nage, il va comprendre ce que câest que travailler gratis ! »
đ§ MoralitĂ© : 11 h 30, câest pas lâheure de manger, câest lâheure de rĂ©flĂ©chir
Dans le Haut-Doubs, on aime les montres précises et les horaires de train (quand il y en a).
Alors quand on nous dit que les femmes cessent dâĂȘtre payĂ©es Ă 11 h 30, ça fait rĂ©flĂ©chir.
Pas parce quâon ne le savait pas, mais parce que rien ne change.
En attendant, Ă LâOuest RĂ©publicain, on a dĂ©cidĂ© dâappliquer le principe Ă la rĂ©daction : Ă partir de 11 h 30, on continue de bosser, mais on le fait par solidaritĂ© symbolique.
Et si quelquâun se plaint, on lui rĂ©pondra que câest pour la cause â et que le cafĂ© est Ă la charge du patriarcat. â
đ°ïž InĂ©galitĂ©s femmes hommes : dans le Haut-Doubs, les femmes bossent gratos Ă partir de 11 h 30 (depuis une semaine)
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