Pontarlier â De notre envoyĂ© casquĂ© sur le rond-point de Nesquik
Samedi 26 juillet, le Haut-Doubs cessera de ronfler. Pas pour la FĂȘte de la Myrtille, pas pour une course de C15, mais pour accueillir la 20e Ă©tape du Tour de France 2025, un final explosif entre Nantua et Pontarlier, qui promet autant de spectacle que de fermetures de route inopinĂ©es.
LâarrivĂ©e est prĂ©vue en centre-ville de Pontarlier, âdevant la Poste ou pas loinâ selon une source municipale, qui sâest ensuite repliĂ©e derriĂšre un plant de gĂ©ranium pour Ă©viter les journalistes.
 Dans cet article
Une étape alpine qui finit en saucisse fumée
AprÚs avoir quitté les rives du lac de Nantua, les coureurs devront affronter un parcours nerveux, parsemé de bosses piégeuses, de faux plats douteux et de montées que seuls les livreurs de fondues du Haut-Jura connaissent vraiment.
Les derniers kilomĂštres se joueront sur les routes du Haut-Doubs, via Levier, Evillers et Houtaud, avec une arrivĂ©e par la dĂ©viation de la RN57, royalement dĂ©corĂ©e pour lâoccasion de ballons, de vaches en plastique, et dâun cerf-volant coincĂ© dans un fil EDF depuis mardi.
Pontarlier, capitale dâun jour⊠et embouteillĂ©e dĂšs 6h43
DĂšs lâaube, les habitants sont invitĂ©s Ă se garer âloinâ, âĂ piedâ, ou idĂ©alement âchez leur cousine Ă Besançonâ. Le plan de circulation temporaire mis en place par la mairie a Ă©tĂ© qualifiĂ© de âlabyrinthe comtoisâ par un motard local, perdu depuis mercredi Ă Doubs.
Bref, un samedi coincé entre le 14 juillet et le 15 août qui va ressembler à un jour de semaine, avec les voitures des frontaliers pare-chocs contre pare-chocs.

Mais Ă part ça, la fĂȘte sâannonce belle : les fromagers prĂ©voient une pĂ©nurie de Morbier dĂšs 9h12, et de ComtĂ© Ă partir de 9h37 ; les cafetiers ont doublĂ© leurs stocks de pintes comtoises ; et la ville attend plus de 20 000 spectateurs venus voir passer les coureurs… en 17 secondes chrono (2.5″ pour les meilleurs ambassadeurs de par Big Pharma).
Le peloton attend le bouquet de gentianes⊠et les biÚres du Haut
Cette 20Ăšme Ă©tape, juste avant le grand final Ă Paris, pourrait bien ĂȘtre dĂ©cisive pour le gĂ©nĂ©ral. Le duel PogacarâVingegaard fait rage. Le Français Romain Bardet, en l’absence du jeune retraitĂ© Thibaut Pinot, rĂ©gional de l’Ă©tape devant sa TV, espĂšre briller : âJâai repĂ©rĂ© lâarrivĂ©e Ă Pontarlier, jâai failli mâarrĂȘter Ă la fromagerie. Mais jâai rĂ©sistĂ©.â
âMais je vis pour ce moment. Quand tu cries âVOITURE DE COURSEâ avec un mĂ©gaphone, tu sais pourquoi tâes lĂ .â
Gaby, retraité et bénévole Tour de France
Les coureurs devront aussi gĂ©rer le climat typique du coin : chaleur Ă©touffante le matin, pluie battante Ă midi, grĂȘle Ă Sombacour, et neige fondue entre 15h et 16h au rond-point du Quick. Bref, un samedi normal, mais il faudra arriver tĂŽt. Non pas pour finir dans les dĂ©lais, mais pour arriver avant des conditions qui seront, nous en sommes sĂ»rs, qualifiĂ©es de “dantesques” par France TĂ©lĂ©vision.
La caravane en mode carnaval doubien : “Allez ComtĂ©-Morbier”
Les organisateurs, extrĂȘmement vigilants sur la sĂ©curitĂ© de la course ont la hantise du fameux “Allez Opi-Omi”. Pour responsabiliser les spectateurs locaux et ne froisser personne, ils ont dĂ©cider de les rassembler sous la banniĂšre “Allez ComtĂ©-Morbier”, comme nous l’a expliquĂ© Christian Prudhomme, interviewĂ© par DjĂ€ysonne lors de la rĂ©vĂ©lation du parcours de cette Ă©dition.
La mythique caravane publicitaire prĂ©cĂ©dera les coureurs dâenviron deux heures. On y attend :
- des lancers de bonbons Haribo (dans les yeux comme chaque année),
- des bobs Cochonou (sacrilĂšge !),
- des mascottes sous calmants,
- et des gens qui crient âYesss !â en courant aprĂšs des paquets de lessive vides.
Un char rĂ©gional pilotĂ© par la fromagerie Badoz proposera des jets de mini-Mont-dâOr sur le public Ă©quipĂ© de casques de ski. Ouf, l’affront du sacrilĂšge est levĂ©.
Le Conseil dĂ©partemental du Doubs, de son cĂŽtĂ©, a prĂ©parĂ© 2 000 dĂ©pliants âDĂ©couvrez le Doubsâ en cas de ralentissement de la caravane entre Houtaud et Pontarlier (comme d’habitude avec les Suisses qui quittent la zone commerciale le samedi en fin de journĂ©e).

Des bénévoles à bout⊠de souffle
La coordination logistique repose sur une armĂ©e de bĂ©nĂ©voles en gilets jaunes fluo, embauchĂ©s pour tout faire : bloquer les ronds-points (mĂȘme si depuis 2018, le sujet est sensible), aiguiller les touristes Ă©garĂ©s, gĂ©rer les crises de nerfs des riverains, et empĂȘcher les enfants de traverser la route pour ramasser un paquet de chips.
âJe dors dans ma Clio depuis hier [30 juin, avec 27 jours d’avance, NDLR]â, confie Gaby, retraitĂ© bĂ©nĂ©vole, postĂ© sur le carrefour du Super U. âMais je vis pour ce moment. Quand tu cries âVOITURE DE COURSEâ avec un mĂ©gaphone, tu sais pourquoi tâes lĂ .â
Les Doubiens entre fierté et klaxon nerveux
Pontarlier attend ce moment depuis la publication officielle du parcours du Tour. Les Doubiens oscillent entre fierté sincÚre et agacement absolu.
âĂa fait rayonner notre territoireâ, dĂ©clare la prĂ©sidente de lâoffice de tourisme, en enlevant du ruban adhĂ©sif dâun panneau âBienvenue Ă Pontarlier â Pas dâentrĂ©e, pas de sortieâ.
âFaut pas que ça me bloque pour aller chercher le Pontâ, nuance GĂ©rard, 53 ans, qui nâa jamais ratĂ© une Ă©dition⊠mais seulement Ă la tĂ©lĂ©.
Bref, samedi 26 juillet, Pontarlier sera le centre du monde cycliste, le temps dâune ligne dâarrivĂ©e, de deux interviews dâaprĂšs-course, et dâun podium aux odeurs de saucisse tiĂšde. Et dĂšs dimanche, tout redeviendra normal : un Doubs de sueur, de pluie et de ronchons, devant la tĂ©lĂ© pour l’Ă©tape des Champs-ElysĂ©es. Mais avec des souvenirs plein les mollets et le jingle Carrefour dans les oreilles pour une semaine.
